Consultez l’édito du mois d’avril 2020 !

Les politiques immobilières des entreprises sont-elles articulées avec leurs stratégies ?

 

En 2020 en France, dans le secteur tertiaire, s’observe un ensemble de pratiques immobilières globalement homogènes. Maturité des métiers, maturité de la filière, fluidité des transactions, la mécanique est rôdée par bientôt 30 ans de progression régulière de la profession dans la maîtrise de son marché. Dans ce paysage plutôt stable et sanctionné par une santé économique semble-t-il à toute épreuve, l’insertion des options immobilières dans les stratégies d’entreprise semble aisée, et potentiellement capable de constituer un apport significatif à l’effort beaucoup plus complexe que les entreprises sont amenées à engager en vue de poser les termes de stratégies capables d’assurer a minima leur survie, au mieux leur pérennité, dans un contexte mouvementé.

 

Cependant, à regarder de plus près les directions immobilières manœuvrer, on constate une relative pauvreté dans le choix des pratiques courantes qui finissent toujours par densifier et raréfier des postes de travail pour réduire la surface et consécutivement les coûts. Centre-ville ou périphérie, bureau isolé, open spaces ou télétravail, bureau attribués ou non,  biophilie ou non, « comme à la maison ». Des normes, pratiques ou certifications de type Développement Durable, Responsabilité Sociale des Entreprises, Bail Vert formulent un bouquet finalement étroit de nuances à apporter à un space planning pragmatique qui compte chaque m² comme une dépense suspecte. A y bien regarder c’est laisser un choix de possibilités  assez mince au dirigeant entre une solution acceptable et une solution qui fasse une réelle différence et, dans tous les cas, rien qui s’apparente à une reprise des termes de sa stratégie d’entreprise dans sa stratégie immobilière.

 

Que l’on pense aux corons, au siège d’Apple, à The Camp en France, au parc industriel, l’entreprise sait pourtant donner une forme qui lui est propre aux objets immobiliers dès lors qu’elle admet que l’usage du bâti, parce qu’il passe par l’expérience que les hommes en ont, est un terme à part entière du langage de l’entreprise et un gisement non seulement de productivité, mais de plus d’entreprise tout court. C’est pris à cette hauteur que l’immobilier introduit une innovation, souvent de rupture, dans le continuum du marché et propose de participer à un avantage stratégique.

 

Réduire les m² ou les coûts associés aux m² sont des objectifs légitimes, mais  ils ne peuvent constituer une politique au service d’une stratégie  puisqu’ils ne proposent rien qui détermine la forme ou l’usage de l’immeuble hormis son prix, ni aucun terme de valeur qui fasse référence au modèle stratégique de l’entreprise. Bien des « politiques » sont pourtant ainsi présentées voire définies, à l’aune d’un objectif de moyens. La focalisation sur la « solution mesurable » – réduire les m² – l’emporte sur la finalité : obtenir une performance économique accrue suivant des termes qui renforceraient la dynamique d’entreprise.

 

Par Frédéric Goupil de Bouillé

Directeur du Projet GLOBAL FM SNCF