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La Science et Technologie au service du Développement Economique

 En 1986, Jean Jacques Salomon écrivait dans la revue Tiers Monde que « bon nombre de pays en développement qui bénéficient d’infrastructures industrielles et universitaires développées vont pouvoir faire, de la maîtrise de l’usage de ces technologies nouvelles, l’une des priorités majeures de leur effort scientifique et technique » (op. cit, p.222). Presque trente-cinq années après ces propos, qu’en est-il réellement des efforts déployés ? Les politiques de S&T ont- elles réellement tenu compte des réalités économiques et sociales et adapté leurs orientations de recherche aux grands enjeux actuels à relever ?

Tout d’abord, sur les indicateurs de S&T, si l’on regarde de plus près les derniers rapports de l’ONU, notamment celui de l’UNESCO de 2015, on s’étonne encore de percevoir la grande hétérogénéité des situations et modèles économiques quant à ces problématiques. S’il est louable de constater une croissance généralisée du nombre de chercheurs au niveau mondial, cinq grand territoires représentent à eux seuls 72% des chercheurs : Union Européenne, Chine, Etats Unis, Japon et Russie. Certains pays « en transition » ou intermédiaires, comme la Chine ou la Russie, ont gagné du terrain, encouragés par des politiques de S&T (pro)actives (financement de programmes d’excellence, rapide augmentation des dépenses et investissements en R&D), et ce, pour parvenir à une forme d’indépendance technologique, jusqu’à souhaitant rendre les autres pays tributaires de leurs propres technologies.

Les performances précitées ne sont pas toutefois toutes révélatrices des économies actuelles. En Amérique Latine, la situation est contrastée avec une volonté d’afficher les politiques de S&T comme prioritaires tout en montrant des résultats modestes sur le nombre de brevets ou le volume de R&D. En Afrique de l’Ouest, les difficultés structurelles de cette région ne permettent pas de consacrer plus de 1% de son PIB à l’enseignement supérieur. La recherche a peu d’impact, et le manque de visibilité et de stratégie nationale sont clairement mises en avant. En Afrique Orientale et Centrale, la situation est moins préoccupante avec un intérêt plus affirmé pour les S&T avec des pays comme l’Ethiopie, le Rwanda, ou le Kenya qui dévoilent une intensité de R&D parmi les plus élevées d’Afrique. En Asie du Sud Est et de l’Océanie, quatre pays assurent une part élevée de la R&D : Singapour, l’Australie, les Philippines et la Malaisie, et ce, en raison de la présence de grandes Firmes Multinationales dans la région. Enfin, et entre autres, les pays Arabes présentent une intensité de R&D relativement faible, notamment dans les pays dépendants de la rente.

Malgré tout, nombreux sont les pays qui ont accru leurs efforts de R&D et renforcé leur intensité de recherche. Maintenant, reste à savoir pour qui et dans quels objectifs la S&T est-elle tournée. Autrement dit, pour quels enjeux agit la S&T et en faveur de quels acteurs. Ces questions sont d’autant plus importantes qu’elles sont actuellement corrélées à la problématique du développement inclusif et durable. Car la S&T doit être associée au développement économique, tout comme le développement économique doit intégrer les enjeux de la S&T pour perdurer. Comment concilier effort de R&D et développement économique sans négliger la dimension du genre dans un certain nombre de pays où les femmes sont sous-représentées dans les politiques de S&T ? Le cas de certains pays arabes le démontre bien. Comment concilier effort de R&D et développement économique sans légitimité donnée au développement durable ? L’Afrique Australe l’a bien retenu par la volonté commune de cette région de mettre la S&T au service du développement durable. Enfin, comment concilier effort de R&D et développement économique tout en priorisant la lutte contre la pauvreté ? L’exemple de l’Inde est fréquent, où les inventions frugales sont en pleine expansion répondant à un marché de masse.

A cet effet, et au regard de l’importance de ces questions actuelles, nous proposons une nouvelle revue, la revue Science, Technologie, Développement, qui, tout en répondant à des problématiques liées à la S&T n’oublient pas leur impact sur le bien-être et le développement des populations. Cette revue, d’ISTE, est disponible sur le lien suivant : http://openscience.fr/Science-Technology-Development et présentera des études pertinentes sur les enjeux actuels du développement dépassant le cadre strict de la croissance économique. Elle ambitionne de répondre aux multiples questionnements de la Science et Technologie au service du Développement Economique durable.

Vanessa Casadella, Université Picardie Jules Verne, RRI

 

Bibliographie :

ONU, Rapport de l’UNESCO sur la science, vers 2030, 2015, Paris.

SALOMON Jean Jacques, 1986, Sciences, Technologie et Développement, le problème des priorités. Revue Tiers Monde, 105, p.213-222.

 

 

 

Science, Technologie, Développement